« Il n’y a pas de
plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime », en entendant
cette parole du Seigneur en ce jour, nos esprits ne peuvent que se transporter
à quelques pas de cette chapelle pour rejoindre le lieu de l’assassinat de la Bienheureuse
Mère Marie de Jésus. Ce lieu qui témoigne certes de la douleur et de la mort,
qui témoigne également de la haine de certains contre Dieu et ceux qui Le
servent mais ce lieu résonne encore des ultimes paroles de la
bienheureuse : « Je lui pardonne pour l’œuvre ».
Alors certes, ces
dernières paroles sont déjà bien inaudibles pour le monde assoiffé de
vengeance. Pardonner à la main qui me tue, voilà bien là une folie aux yeux du
monde qui s’accroche à la vie en pensant ainsi atteindre les sources de la
fontaine de jouvence. Mais pour nous, en étant porté par les Paroles même du
Seigneur nous pouvons voir plus loin et saisir, dans un réalisme vrai quant à
la nature de notre existence humaine destinée à l’éternité bienheureuse, nous
pouvons saisir l’enracinement de ce pardon. « Aimez vos ennemis, et priez
pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui
est aux cieux », cet appel que le Seigneur nous adresse à tous et à chacun
prend toute sa profondeur aujourd’hui dans ces dernières paroles de la
bienheureuse. Essayons ensemble d’emprunter ce chemin pour nous laisser nous
aussi irradier par la grâce.
Porté par la Foi, nous le
savons, notre vie d’ici-bas n’est que le tremplin vers l’Eternité, notre vie
toute entière ne trouve son sens véritable que dans cette recherche permanente
de l’union à Dieu, dans l’offrande de notre être à la présence divine. Et alors
que nous rentrons dans ce temps du Carême nous retrouvons ici toute la portée
de ce temps liturgique qui doit nous aider à nous abandonner entre les mains de
Dieu, nous abandonnant nous même pour laisser toute la place au Seigneur. La
Bienheureuse le dit avec force en écrivant : « Sacrifions tout,
détruisons tout, écartons tout ce qui gêne l’union intime de nos âmes avec
Jésus ! Il en coûte, mais il en coûte encore plus de sentir un mur entre
le Bien-Aimé et nos pauvres âmes. Plus rien que Jésus ». Quel magnifique
écho à ce cri de Ste Thérèse d’Avila : « Dieu seul suffit ». Et prenons au sérieux ces paroles : plus
rien ! que Jésus ! c'est-à-dire que tout devient second par rapport à
Dieu, tout, même notre propre vie que nous recevons d’ailleurs de sa grâce. Et
nous voyons là s’opérer un formidable changement de référentiel, nous percevons
combien la vie du monde est bien éloignée de la vie de la Foi car la Foi nous
donne comme unique trésor, comme unique objet de nos désirs, comme unique fin
de notre existence le Seigneur Jésus.
Et vous mes biens chères
sœurs, vous nous rappelez cela, séparé du monde que vous portez dans vos
prières vous cherchez toujours plus à laisser toute la place au Christ. Et par
votre vie vous nous rappelez quel doit être notre vie à tous car c’est bien
chacun d’entre nous qui est appelé sur ce chemin, ce chemin de sainteté et de
conversion qui demeure un combat. Combat contre nous même, contre notre nature
blessée marquée par le péché, combat contre notre orgueil qui nous fait nous
illusionner sur nous même en nous faisant croire à notre autosuffisance. Et ne
pensons pas que ce combat ne fut pas aussi celui des saints, ne fut pas aussi celui
de la bienheureuse Mère Marie de Jésus. Ce combat en faveur du Christ en
chacune de nos vies il nous concerne nous tous et la bienheureuse en laisse
transparaître une bribe au sujet du sacrement de la confession lorsqu’elle
écrit : « Je me confesse à peu près tous les quinze jours […]
Croiriez-vous que j’ai, plus que jamais mes vieilles répulsions pour le
confessionnal ? C’est une vraie tentation que j’ai la lâcheté de ne pas
vaincre, reculant le pas quand il me coûte trop à faire. Voilà un premier point
à réformer ; mais il n’est pas commode, car il est impossible de dépeindre
mes répugnances ». Ainsi oui, ce combat contre soi-même habite chaque âme
humaine mais ne nous égarons pas en pensant qu’il nous faudrait compter sur nos
pauvres forces, ce serait encore tomber dans l’illusion de notre soi-disant
puissance. Non, ce n’est pas nous qui devons régner sur nous même, mais nous
devons permettre au Christ de régner sur nous ! Et comme l’écrit encore la
Bienheureuse citant Ste Marguerite Marie : « assurons-nous que, si
nous lui sommes fidèles, nous ne manquerons de secours que lorsque Lui-même
manquera de puissance ». Ainsi, même et peut-être surtout en notre
conversion, comptons uniquement sur le Christ.
C’est en étant uni
toujours plus radicalement au Christ que nous lui permettrons de régner sur nos
âmes et nos vies et que nous nous laisserons porter sur le chemin de la
sainteté ; c’est en étant uni toujours plus radicalement au Christ que la
charité divine embrasera nos âmes d’amour et de pitié pour toutes les âmes
errantes de notre temps ; c’est en étant uni toujours plus radicalement au
Christ que nous souffrirons avec Lui des offenses injustes qu’Il subit ;
c’est en étant uni toujours plus radicalement au Christ que nous pourrons vivre
en chaque instant : Plus rien ! Que Jésus !
Amen.
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