En
recevant l’évangile de ce Dimanche nous pourrions être quelque peu désorienté
ou bien rassuré. En effet, en voyant la colère de Jésus face aux marchands du
temple certain pourrait très bien se dire en eux-mêmes que, puisque le Christ a
eu ce mouvement de colère et bien la colère peut être justifiée, ma propre
colère peut être justifiée. D’autres, au contraire, vont être quelque peu
abasourdi car comment Jésus, Lui qui est sans péché, sans défaut, dans la
perfection de la bonté de Dieu, comment Lui a-t-il pu avoir ce mouvement de
colère c’est incompréhensible.
Tout
d’abord il nous faut discerner que tout mouvement de colère n’est pas
équivalent. Nous le savons pour nous même, il y’a de grandes colères et de
petites colères, il y’a des colères qui ne sont manifestées que par un
mouvement d’humeur, il y’a d’autres colères qui vont beaucoup plus loin jusqu’à
l’agression pure et simple comme on peut l’entendre dans nos journaux
d’information. Il ne nous faut donc pas considérer la colère dans une globalité
mais bien la considérer pour ce qu’elle est, pour les effets qu’elle a et bien
entendu pour son origine.
C’est
ainsi qu’il peut y avoir parfois de « saintes colères ». Cette
« sainte colère » désigne l’indignation de quelqu'un qui, voyant
quelque chose de bon abîmé ou profané, n'a pas d'autre réaction possible que de
se déchaîner dans un comportement un peu insensé pour protester devant le bien
qui est ainsi dévasté.
Et
pour en revenir à Jésus, la colère provient bien du fait qu’Il voit le Temple
de Jérusalem profané par les marchands et les changeurs. Le Christ a été ravagé
par la colère car ce Temple ainsi profané, Il nous le dit Lui-même, ce Temple
c’est Lui-même, c’est sa présence au sein du peuple d’Israël, c’est sa présence
au sein du monde. Le Christ est touché en son être profond par la profanation
du peuple d’Israël qui profane la présence de Dieu dans le temple en avilissant
la dimension spirituelle du sacrifice à des intérêts commerciaux.
Dans
le Temple, c’est Dieu qui est bafoué, c’est le Christ qui est bafoué et
profané. Dans le temple c’est Dieu qui est utilisé à des fins commerciales,
c’est le Christ qui voit sa mission détournée de la même façon. Dès lors, ce
mouvement de colère est porté malgré tout par l’Amour, par le Zèle du Seigneur
qui désire défendre ce salut qu’Il vient apporter au monde, qui désire défendre
la réalité de sa présence.
Ces
changeurs, ces marchands du Temple détournent Dieu à leur propre profit, et, en
extrapolant quelque peu, nous pourrions dire qu’ils n’ont que faire de Dieu et
qu’ils ne sont là que pour faire des affaires. Ils utilisent Dieu pour leur
propre service, leur propre désir et Dieu n’est pas présent dans leurs actions.
Et
c’est bien pour cela que le Seigneur Jésus l’affirme, ce temple de pierre, ce
temple profané sera détruit mais il sera relevé, ô d’une bien autre manière,
car il ne sera plus fait de pierre mais Il sera le Christ Lui-même, le Christ
ressuscité, le Christ offrant au monde son Salut. Et pour notre part, nous
n’appartenons pas à ce monde ni à ce temps du temple de Jérusalem, nous avons
cette grâce, nous tous, d’être des membres du Temple qu’est le Christ Lui-même,
nous avons cette grâce, de par notre baptême, d’être membre du corps du Christ,
d’être nous-même ces temples du Seigneur. Et si nous sommes tout cela, il
convient dans un surcroît d’humilité de pouvoir reconnaître que nous faisons
parfois comme ces changeurs ou marchands du Temple, c'est-à-dire que nous
mettons parfois le bon Dieu de côté et que nous traitons nos affaires de notre
côté, sans Dieu. Il nous faut reconnaître qu’à certains moments, nous dévastons
le Temple Nouveau qui est le corps du Christ. Nous ravageons l'Église, nous
méconnaissons le mystère même de la présence de Dieu par toutes sortes de
péchés, de manques de confiance, de manques de bienveillance, de manques de
fois, de manques d'espérance, de manque d'amour les uns vis-à-vis des autres.
Et tout ceci nous est rappelé particulièrement en ce temps de carême qui est un
temps propice à la conversion, à notre propre conversion du cœur car devant
notre péché imaginons la sainte colère du Seigneur qui désire chasser de nos
cœurs, de nos âmes tout ce qui lui est étranger. Alors en ce troisième Dimanche
de carême, l’effort que nous sommes appelés à faire c’est peut-être de laisser
faire le Seigneur, de laisser le Seigneur déblayer nos âmes, nos cœurs de tout
ce qui lui est étranger. Il faut que nous laissions le Christ déblayer lui-même
le terrain pour que sa Résurrection opère en nous son œuvre de miséricorde et
de vie. Mais rappelons-nous, laisser faire ce n’est pas se dédouaner de toute
action, c’est se laisser modeler par la grâce du Seigneur qui travaille dans un
cœur, dans une âme tournée vers Lui et cela dans la prière, dans le jeûne et
aussi dans l’aumône. Alors travaillons pour laisser le Christ déblayer le
chemin de l’action de sa grâce.
Amen.
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