2000
ans se sont écoulés mais ô combien l’évangile de ce dimanche demeure actuel, ô
combien la réflexion humaine demeure identique malgré les siècles. Une
catastrophe survient sans responsabilité évidente et la pensée humaine
considère que cette catastrophe est due à la colère divine. La tour de Siloé
s’effondre causant la mort de quelques uns et c’est bien la vertu de ces
victimes ou de leurs parents qui est remise en cause : « est-ce eux
ou leurs parents qui ont péché et mérité ce châtiment ? » telle est la
question qui se lit comme en filigrane de l’évangile d’aujourd’hui. Et
aujourd’hui il en est bien de même. Dans l’ordre laïque, notre société est à la
recherche de responsabilité ce qui en soi n’est pas une mauvaise chose mais
elle le fait d’une manière assoiffée rejetant la fatalité du drame, l’accident
en tant que tel. Et cette quête s’explique dans le fait que l’esprit humain
aspire à tout comprendre, à tout contrôler mais cela n’est qu’illusion car bon
nombre de chose arrive sans que cela soit pour autant prévisible. Pour la tour
de Siloë de l’évangile, aujourd’hui on dirait que cela est dû à la défectuosité
des matériaux de construction ou bien encore au vieillissement de la structure,
ou à tant d’autres choses. C’est comme si en ayant compris le pourquoi du drame
l’esprit humain trouvait la mort plus acceptable car plus compréhensible, plus
appréhendable.
Dans
l’ordre d’une spiritualité peu éclairé, lorsque les causes sont obscurs et bien
dès lors Dieu est tenu comme responsable probable du drame mais comme on
respecte encore un peu le bon Dieu et bien on met ça sur le compte d’une
punition divine qui résulterait des méfaits accomplis par les victimes. Et ne
croyez pas que cette réflexion demeure improbable aujourd’hui car l’expression : « qu’est
ce que j’ai fait au bon Dieu pour mériter ça » est dans la même veine.
Ainsi les évènements malheureux seraient des punitions divines que nous
n’aurions d’autres choix que d’accepter comme une épreuve que Dieu nous
donnerait. Une année est plus difficile que les autres et certains se disent
que Dieu les éprouve durement.
Démasquons
bien chers amis, démasquons cette réflexion, cette réaction qui fait de Dieu le
bourreau de nos vies, qui classe le bon Dieu dans la case des sadiques se
réjouissant du mal qu’Il produirait. Redisons-le haut et fort, Dieu est amour,
Dieu est l’excellence de la bonté et cette identité de Dieu l’exclue de cette
vision sadique. Laissez-moi vous poser une question, sans faire de la
psychologie à deux sous, est-ce que les parents sont responsables des frasques
accomplis par leurs enfants ? Est-ce que les parents d’Hitler sont
responsables de l’holocauste accompli par leur fils ? La réponse est non.
Alors ayons la même réflexion pour le bon Dieu qui nous a créé libre, Dieu ne
peut être tenu responsable du mal qu’accomplissent ses créatures, et dans
l’ordre de l’autonomie de la nature, Dieu ne peut être tenu responsable des
aléas de la création qui évolue selon ses règles.
Mais
attention, cela ne signifie pas que Dieu est le spectateur impuissant du
théâtre du monde, cela signifie que Dieu respecte et la liberté humaine et
l’autonomie de la nature mais qu’Il demeure celui qui nous soutient et nous
accompagne dans tous les aléas de nos vies. Nous ne sommes pas des marionnettes
entre les mains de Dieu tout comme la nature elle-même.
Voilà
bien le premier enseignement de l’évangile de ce dimanche mais il y’en a un
second qui peut sembler obscur et qui est porté par la parole du
Seigneur : « si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de
même ». Cette parole du Seigneur
mêle les deux considérations de la mort, la mort physique biologique qui met un
point final à notre vie ici-bas et la mort spirituel qui enferme dans l’éternel
enfer. Que nous mourrions, c’est un fait de la nature mais notre avenir éternel
demeure attaché à notre responsabilité. La mort biologique ouvre vers la vie
éternelle ou bien vers la mort éternelle. Nous naissons ici-bas pour mourir
ici-bas mais afin de naître à la vie éternelle. On pourrait penser que cette considération
est déprimante : affirmer que l’on naît pour mourir, cela semble
l’expression d’un dépressif et cela serait vrai si la vie, si notre vie ne se
résumait qu’à cette poignée d’année que nous avons ici-bas or nous, nous le
savons, la mort demeure l’unique porte qui ouvre à la vie véritable. Et cela
n’est pas une échappatoire pour ne rien faire en notre vie actuelle car notre
éternité se construit dès aujourd’hui, cela ne nous conduit pas à accepter le
malheur en nous disant que le bonheur sera dans l’éternité, cela doit nous
conduire à vivre notre vie actuelle en étant tendu vers les réalités célestes,
vers l’éternité. Ne vivons pas comme si nous étions éternels mais vivons en
nous préparant à l’éternité afin que nous demeurions auprès de Dieu.
Et
pour ce faire, l’appel du Seigneur est impératif :
« convertissez-vous » car l’éternité se construit dès maintenant. Ne
prenons pas à la légère la conversion de notre vie, ne prenons pas à la légère
l’appel à la sainteté, à l’amitié avec le Christ, ne prenons pas à la légère
non plus la mission qui est la nôtre d’annoncer le Seigneur pour donner des
fruits de grâce en notre vie.
Mais
en nous disant cela je me rends bien compte que les mots sont bien pauvres pour
exprimer toute l’intensité de cette sainte réalité dont il nous faut vivre,
surtout ne prenons pas à la légère notre avenir éternel et convertissons-nous
avant qu’il ne soit trop tard.
Amen.
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