Bien
chers amis, l’évangile de ce dimanche, ne nous donne pas un de ces grands
principes si essentiels pour gouverner nos vies, l’évangile de ce dimanche, le
Christ Lui-même nous donne une pratique à mettre en œuvre, pratique qui
s’enracine dans la véritable charité mais pratique qui va bien à l’encontre de
notre manière de procéder de façon habituelle et je dirai presque de façon
naturelle.
En
effet, lorsque quelqu’un nous fait du tort, nous agissons habituellement d’une
manière différente à celle de l’évangile. C'est-à-dire que lorsque quelqu’un
nous a fait du mal nous avons parfois cette habitude de le répéter à ceux qui
nous entourent, proche ou moins proche et dans une sorte de proclamation
discrète nous annonçons à tous ce que cette personne a fait. Et c’est seulement
et éventuellement dans un second temps que nous allons trouver cette personne
pour la mettre face au mal qu’elle a provoqué en nous.
Mais
le Christ dans l’Evangile nous invite à aller directement trouver la personne
qui nous a fait du tort et nous invite donc à ne pas proclamer à tous le mal
commis à notre encontre : « Si ton frère a commis un péché contre
toi, va lui faire des reproches seul à seul ».
Mais
pourquoi agissons-nous ainsi, pourquoi avons-nous cette tentation de proclamer
le mal commis par autrui à notre encontre avant que d’aller éventuellement
trouver la personne concernée ?
Nous
pourrions tout d’abord penser que partager notre douleur avec d’autres
amenuiserait cette douleur. A ce sujet Kafka écrivait : « Quand tu es
devant moi et que tu me regardes, que sais-tu des souffrances qui sont en moi
et que sais-je des tiennes ? Et si je me jetais à tes pieds en pleurant et
en te parlant de moi, que saurais-tu de plus que ce que tu sais de l’enfer
quand quelqu’un te raconte qu’il est chaud et terrible ? ». La
douleur est intime et le fait de la partager ne conduit pas toujours les autres
à la reconnaître et même au contraire, ils l’évacuent parfois par ces simples
mots « ce n’est pas grave » produisant en nous un sentiment de
solitude face à la douleur subie réellement.
Nous
pourrions également agir ainsi c'est-à-dire partager la douleur subie afin de
faire souffrir la personne qui nous a fait souffrir et cela en abimant l’image
que les autres se font de cette personne, en dévoilant les torts que cette
personne nous a fait ; il y aurait là comme un esprit de vengeance
inavoué.
Mais
le Christ nous indique une autre voie, une autre manière d’agir, Il nous
indique la manière chrétienne d’agir qui doit nous conduire à aller directement
trouver la personne qui nous a fait souffrir et le Christ semble quelque peu
mystérieux : « Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui
faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère ».
« S’il t’écoute tu as gagné ton frère », qu’est ce que cela peut dire
si ce n’est qu’en allant trouver la personne qui nous a fait du tort et en
mettant cette personne face aux torts qu’elle nous a fait, nous lui permettons
de prendre conscience du mal commis et nous lui permettons également de
demander pardon et de grandir sur le chemin de la conversion, sur la voie de la
vertu. Ainsi, le Christ nous invite à demeurer fidèles dans nos rapports les
uns avec les autres, à demeurer fidèles à la dynamique de vérité, de pardon et
de miséricorde.
Et
le Christ ne fait pas non plus dans l’angélisme car si la personne ne reconnaît
pas le mal qu’elle a produit, les torts qu’elle a fait cela peut conduire
jusqu’à la considération d’être en dehors de l’Eglise. Il ne s’agit donc pas
ici de bon sentiment, mais bien d’un réalisme qui prend en considération chaque
personne mais qui s’enracine dans la vérité et la miséricorde.
Mais
à travers tout cela, si nous considérons ceux qui nous ont fait du tort, il
nous faut également nous considérer nous même dans le tort que l’on peut faire
aux autres, dans le tort que l’on peut faire directement à Dieu dont nous
blessons la relation par le péché, dans le tort que l’on fait à Dieu à travers
le mal que nous faisons aux autres. Gardons à l’esprit cette autre phrase
évangélique : « qu’as-tu à regarder la paille dans l’œil de ton
voisin alors que tu ne vois pas la poutre qui est dans le tien ». Ainsi,
il nous faut également être assez humble pour reconnaître ses torts, être assez
humble pour demander pardon, assez humble pour être pardonné. Et si cela est
vrai dans nos relations interpersonnelles, cela l’est bien plus envers le bon
Dieu qui nous propose toujours sa miséricorde dans le sacrement de la
confession. Dieu qui par ce sacrement nous donne en plus de sa miséricorde la
force et le courage d’être nous même disciples de miséricorde envers ceux qui
nous entourent.
Alors
en ce dimanche, demandons tout d’abord au Seigneur la force et le courage
d’aller toujours trouver ceux qui nous ont fait du tort avant que d’en avertir
la terre entière, et demandons également au Seigneur de faire grandir en nous
la vertu d’humilité afin que souvent nous nous remettions face à Lui dans le
sacrement de la confession, source de l’Amour divin et donc source de toute
miséricorde.
Amen.