Une
phrase de l’évangile de ce dimanche peut sembler difficile à entendre :
« Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme,
ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être
mon disciple ». Cette phrase peut sembler difficile car nous avons bien
souvent l’habitude de raisonner en mode binaire du tout ou rien qui nous fait
comprendre que le Seigneur nous demanderait de n’aimer que Lui et de ne rien
aimer d’autres. Mais, bien entendu, rassurons-nous ce n’est pas ce que le Seigneur nous demande.
Le Seigneur nous demande simplement que notre amour de préférence soit à Lui.
C'est-à-dire que parmi tous ces amours familiaux, personnels et divins, l’amour
premier, l’amour préférentiel soit au Seigneur. Dire cela signifie que notre
Amour du Seigneur devient principe des autres amours, que notre Amour du
Seigneur ordonne et oriente nos autres affections. Cela signifie que notre
Amour de Dieu porte et fonde nos autres affections.
Ainsi
nous pouvons percevoir combien il ne s’agit pas de négations des autres
affections, des autres amours familiaux ou personnels mais bien d’une
sanctification de toutes nos affections par l’amour premier que nous portons à
Dieu.
Et
en ce dimanche, il est une belle figure qui nous est donnée en exemple dans cet
attachement premier au Seigneur, il s’agit bien entendu de celle qui est
aujourd’hui élevée à la gloire des autels, à savoir Ste Mère Teresa.
Sainte
Mère Teresa est reconnu dans l’ensemble du monde comme étant un figure de
solidarité elle qui reçut le prix Nobel de la paix en 1979 et qui fut même
reçue à l’ONU à la tribune de laquelle elle donna un discours mémorable en
1995. Mais cette reconnaissance de Mère Teresa fait généralement fi de la seule
réalité qui a porté toute sa vie et toute son action : le Christ Jésus.
Car Mère Teresa n’a pas d’abord agi par solidarité mais elle a bien agi par
charité, par cette charité unique qui procède de son attachement au Seigneur.
Et cela est perceptible dès la genèse de la fondation des missionnaires de la
Charité alors qu’elle effectuait un stage chez les « Medical Sister »
à Patna, elle vint alors en aide à une vieille femme jetée par son fils dans
une poubelle, couverte de fourmis. Au début de l'année 1948, elle s'installe
pour faire la classe et tenir un dispensaire dans un bidonville de Calcutta, où
d'anciennes élèves deviennent avec elle les premières missionnaires de la
charité.
En
1952, la rencontre d'une femme blessée agonisant sur un trottoir les pieds
rongés par des rats l'amène à entreprendre une nouvelle tâche. Harcelant les
autorités de la ville, elle obtient une vieille bâtisse pour accueillir des
personnes souffrant de tuberculose, de dysenterie ou de tétanos et dont les
hôpitaux ne veulent plus. Des dizaines de milliers de miséreux sont passés par
ce "mouroir": beaucoup y ont trouvé "une fin digne". Mais
les soins des religieuses et des nombreux bénévoles qui s'y succèdent ont aussi
permis à des milliers d'autres de se remettre. A Calcutta, Mère Teresa ouvre
ensuite un vaste orphelinat, Sishu Bhavan, puis la léproserie de Shantinagar,
où sont tissés les désormais célèbres saris blancs bordés de bleu portés par
les quelque 4.500 missionnaires de la charité aujourd'hui engagées dans le
monde entier.
Et
dans cette attention envers les plus pauvres des pauvres, Sainte Mère Teresa
raconte : « Ceux qui sont matériellement pauvres sont souvent des
gens merveilleux, absolument admirables.
Un
soir nous sommes sorties et nous avons ramassé quatre personnes dans la rue. Et
l'une d'entre elles était dans un état très grave. J'ai dit à la sœur : "
Occupez-vous des trois autres, je prendrai soin de celle qui est dans l'état le
plus grave. Ainsi, j'ai fait pour elle tout ce que mon amour pouvait faire. Je
l'ai mise au lit. Sur son visage il y avait un sourire tellement beau ! Elle a
pris ma main entre les siennes et n'a dit qu'un mot : " Merci ". Elle
est morte aussitôt après. En la regardant, je n'ai pas pu m'empêcher de faire
un petit examen de conscience. Je me suis demandé : " Qu'est-ce que
j'aurais dit, si j'étais à sa place ? " Et ma réponse était simple.
J'aurais essayé d'attirer un peu l'attention sur moi. J'aurais dit : "
J'ai faim, je meurs, j'ai froid, j'ai mal " ou quelque chose de ce genre.
Mais elle m'a donné beaucoup plus, elle m'a donné son amour par reconnaissance.
Elle est morte, un sourire sur le visage.
Puis
il y avait un homme que nous avons trouvé dans les égouts, à moitié mangé par
des vers, et après l'avoir amené à la maison, il nous a dit en toute simplicité
: "J'ai vécu ma vie comme un animal, mais je vais mourir comme un ange,
qu'on aime et dont on prend tant de soin". Plus tard, une fois que nous
avons enlevé tous les vers de son corps, il a dit une seule phrase : " Ma
sœur, je vais rentrer chez moi, dans la maison de Dieu " et il est mort.
C'était tellement beau à voir, la grandeur d'âme de cet homme qui a pu parler
ainsi sans blâmer personne, sans aucune comparaison avec les autres. Comme un
ange ! C'est la grandeur des gens qui sont très riches spirituellement, même
lors qu'ils sont si pauvres matériellement ». Face à cette pauvreté
matérielle, Sainte Mère Teresa rappelait également que la plus grande pauvreté
c’est le manque d’amour.
Mère
Teresa avait coutume de dire que son action n'était qu'une "goutte de
délivrance dans un océan de souffrance", mais que "si cette goutte
n'existait pas, elle manquerait à la mer". Et bien nous, chers frères et
sœurs, nous sommes aussi appelés à apporter notre goutte de délivrance, à être
nous même des missionnaires, des disciples de la charité, à notre mesure, dans
les lieux qui sont les nôtres, affrontant les pauvretés de notre temps. Ne
disons pas que c eque nous ferons sera insignifiant car la charité n’est jamais
insignifiante. Il nous faut suivre cet exemple de Ste Mère Teresa en nous
rappelant que toute l’action de Sainte Mère Teresa, aussi louable soit-elle,
n’avait comme origine que l’amour premier pour le Christ. Ainsi, il nous faut
nous aussi avoir cet amour préférentiel pour le Christ, amour préférentiel qui
fera de nous les disciples de la charité divine.
Mais
parmi toutes les misères, toutes les difficultés qu’a affronté Sainte Mère
Teresa il y’en a une qu’elle a toujours considéré comme étant la plus grande
menace auquel devait faire face l’humanité, il s’agit de l’avortement. Elle a
dit lors de son discours à Oslo en recevant le prix Nobel : «Le plus grand
destructeur de la paix, aujourd'hui, est le crime commis contre l'innocent
enfant à naître. Si une mère peut tuer son propre enfant, dans son propre sein,
qu'est-ce qui nous empêche, à vous et à moi, de nous entretuer les uns les
autres ? L'Écriture déclare elle-même : « Même si une mère peut oublier son
enfant, moi, je ne vous oublierai pas. Je vous ai gardés dans la paume de ma
main. » Même si une mère pouvait oublier... Mais aujourd'hui on tue des
millions d'enfants à naître. Et nous ne disons rien. On lit dans les journaux
le nombre de ceux-ci ou de ceux-là qui sont tués, de tout ce qui est détruit,
mais personne ne parle des millions de petits êtres qui ont été conçus avec la
même vie que vous et moi, avec la vie de Dieu. Et nous ne disons rien » ou
encore « Si vous ne voulez pas l’enfant à naître, donnez-le-moi, je le veux !
», s’est-elle écriée à Ottawa en septembre 1988. Sainte Mère Teresa nous
rappelle que : « faire un avortement c’est tuer l’amour » ;
elle nous rappelle le prix et l’importance de la vie, de toute vie qui demeure
sacrée.
Et
je ne peux conclure cette trop brève ébauche de la personnalité de Sainte Mère
Teresa sans évoquer la joie qui l’habitait. Elle, au milieu des souffrances et
atrocités humaines, confrontée tous les jours à la douleur, à la souffrance et
à la mort, gardait en son âme une joie intacte. C’est ce dont témoigne un
prélat qui l’a bien connu : «Ce qui m'a toujours frappé avant tout chez
elle, c'est sa joie. Elle n'avait rien de sinistre! Elle semait la joie partout
où elle passait, comme une mère aimante. Trois mots revenaient sans cesse chez
elle qui s'exprimait en anglais: “cheerfulness”, la joie, l'allégresse, “total
surrender”, l'abandon total, au Christ, et surtout “loving trust”, l'amour
confiance.» Ce prélat dit aussi être marqué par cette phrase « antidote de
morosité » qui guidait cette sainte: «Ne laissez aucune tristesse être si
forte au point qu'elle vous fait oublier que le Christ est ressuscité.».
En
ce dimanche, laissons-nous enseigner par Sainte Mère Teresa, choisissons le
Christ comme principe de nos vies en enracinant nos existences dans la prière
car Sainte Mère Teresa nous le
dit : « nous avons besoin de prier ! Sans la force de la prière,
notre vie est insupportable » et
« plus nous recevons dans le silence de la prière, plus nous
donnerons dans la vie active ». Ainsi gardons à l’esprit le chemin de la
charité vraie que nous laisse Sainte Mère Teresa : « La prière
engendre la foi, la foi engendre l'amour, et l'amour engendre le service des
pauvres ». Alors attachons-nous à la prière pour la Foi, l’amour et le
service des pauvres de notre temps.
Amen.